Déclaration Sud Éducation Basse-Normandie
au CHS-CT Académique du 7 février 2013
Monsieur Le Recteur,
Depuis plusieurs années, Sud Éducation dénonce haut et fort les conséquences des réformes du service public d’éducation, une de ces conséquences impliquant une dégradation des conditions de travail. Alors que de nouvelles réorganisations sont annoncées, sur lesquelles les personnels ne sont toujours pas consultés, alors que la « refondation » s’inscrit dans le prolongement des contre-réformes précédentes, il nous semble urgent de donner tous les moyens d'action aux CHSCT leur permettant d'accomplir les missions qui leur sont attribuées.
Depuis plusieurs années les personnels, tous les agents confondus, ont vu une multiplication de leurs tâches, une parcellisation de leur métier. Ils ont assisté à des réorganisations sans que soient pris en compte leur avis et encore moins leurs conditions de travail. Le personnel enseignant assure près de 40 heures hebdomadaires (un peu plus dans le premier degré, un peu moins dans le second degré – rapport de l’IGEN au ministre de l’Éducation nationale, n° 2012-070, Juillet 2012). Ces personnels doivent en outre surmonter quotidiennement de nombreux obstacles et supporter des atteintes toujours plus nombreuses à leurs missions.
Dans les orientations stratégiques du MEN pour l'année scolaire 2012/2013 en matière de prévention des risques professionnels s'inscrivant dans le cadre, il est écrit en préambule que « la santé des personnels, et plus largement leur bien-être au travail, est un élément essentiel de politique des ressources humaines. L'employeur est responsable de la santé et de la sécurité des personnels conformément à l'article 4121-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 modifié susvisé. » .
Le bien-être du personnel ne peut être effectif que si des mesures portant sur les raisons de la souffrance au travail sont prises. La souffrance des agents vient :
• de la baisse drastique des effectifs des agents et des enseignant-e-s (et sa conséquence : l’augmentation du nombre d’élèves par classe),
• de la non prise en compte réelle des élèves à besoins particuliers (les 3èmes Préparatoires aux formations Professionnelles, handicaps, différentes dyslexies…),
• de la baisse des horaires d’enseignement dans certaines disciplines (en français par exemple : 800h de moins à l’arrivée en 2de),
• de l’individualisation de l’enseignement,
• de la charge qu’occasionnent les nouvelles technologies : bulletins et notes électroniques, cahier de textes numérique, permettant à la hiérarchie de surveiller et contrôler en continu « l’efficacité » des enseignant-e-s,
• de l’empilement des réformes,
• de la décentralisation des personnels TOS,
• de la pression managériale hiérarchique, et notamment la double hiérarchie pour les agents décentralisés,
• de la mise en concurrence des établissements,
• de la non-reconnaissance sociale et pécuniaire,
• de la pénibilité déniée…
Les sources des souffrances étant connues, les personnels sont en droit d'attendre des mesures concrètes, notamment au sein des CHSCT puisque ne l'oublions pas, selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la santé est « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Pour rappel, l'accord du 20 novembre 2009 sur la santé et la sécurité au travail dans la Fonction publique insiste sur l'enjeu que constitue l'amélioration des conditions de travail, pour la promotion d'une gestion des ressources humaines modernisée, et d'un dialogue social rénové.
Or que se passe-t-il aujourd'hui ? La politique de M. Peillon, ayant pour mot d’ordre de mettre l’enfant au cœur du système, oublie le « cadre », les personnels de l’EN, personnels sans qui « l’enfant ne peut être au cœur du système ». Dans l’intérêt de l’enfant, il est important d’associer toutes les composantes travaillant à l’éducation et notamment les CHSCT.
Encore une fois, à Sud Éducation, nous regrettons que le code du travail soit bafoué. L’article L.4612-8 n’est pas appliqué. Cet article stipule que toute organisation ou réorganisation du travail doit faire l’objet d’une consultation des CHSCT. L’État doit donc montrer l’exemple :
• sur la refondation de l’école à tous les niveaux scolaires ;
• sur la réorganisation des GRETA.
Les CHSCT doivent être consultés avant toute annonce publique, qu’ils soient CHSCT ministériel, académiques, départementaux ou territoriaux.
Cela montre malheureusement que le MEN n’a pas encore assimilé le passage des CHS aux CHSCT, ou bien alors mène une politique de l’autruche sur les conditions de travail de ses personnels. Est-il de besoin de rappeler à notre employeur l’article L 4121-1, qui l’oblige à mettre en œuvre des mesures de prévention pour :
• éviter les risques,
• évaluer les risques qui ne peuvent être évités,
• combattre les risques à la source,
• adapter le travail à l'homme.
Si la promesse du Changement doit être tenue, commencez par inverser l’échéance des instances :
• Convocation du CAEN avant celle du CTA,
• Consultations des CHSCT avant toute nouvelle réorganisation du travail, et prenez en charge la mise en place et le suivi des PPMS et des DUER.
Le décret n° 2011-774 du 28 juin 2011 a profondément modifié le décret n° 82-453 du 28 mai 1982, notamment en créant les CHSCT, en remplacement des CHS, en y intégrant les conditions de travail. Cette réforme s'inscrit pleinement dans l'obligation faite aux employeurs publics d'assurer la santé et la sécurité des personnels au travail. Dans les orientations du MEN il est dit qu'il convient, dans chaque académie et chaque département, de finaliser l'installation des différentes instances, et de s'attacher à créer les conditions optimales de fonctionnement pour qu'elles jouent pleinement leur rôle autour des questions de santé, sécurité et des conditions de travail (enquêtes, visites, etc.). En tout état de cause, il convient de souligner qu'il n'y a pas de hiérarchisation entre les niveaux d'instance.
Le CHSCT doit en effet devenir le lieu de discussion des politiques académiques et départementales en matière de prévention des risques professionnels. Il donne son avis sur tout projet d'aménagement important susceptible de porter atteinte à la santé et à la sécurité des personnels. Les CHSCT devraient être consultés sur toutes les mesures modifiant les conditions de travail et si le Code du travail était respecté, ce qui n’est pas le cas, c’est à partir de 50 salarié-e-s que devrait être créé un CHSCT : cela signifie que la quasi-totalité des lycées, lycées professionnels et collèges devraient avoir un CHSCT, que pourraient être créés des CHSCT dans les circonscriptions du 1er degré, mais aussi pour les personnels des rectorats et des IA, des CDDP et CRDP… C’est ce qu’exige Sud Éducation qui revendique la création de CHSCT dès 50 salarié-e-s, comme dans le privé.
Comme la médecine du travail, telle que la définit le Code du Travail (-L.4624-1 et suivants) dans la Fonction Publique d’État, le médecin de prévention (médecin du travail dans le privé) :
• s’assure que le travail ne nuit pas à la santé des salarié-e-s et respecte leur intégrité physique et psychologique,
• propose des solutions à l’employeur pour améliorer les conditions de travail (salles insonorisées, tableaux réglables en hauteur),
• supprime les causes des maladies, accidents, souffrances, dues au travail.
• propose dans le cadre d’un plan de prévention, une adaptation du poste de travail : réduction du temps de travail, réduction du nombre d’élèves par classe, faire modifier une organisation pathogène, imposer des équipements de salles personnalisés, etc.,
L’administration est tenue de prendre en compte les observations du médecin du travail, sinon elle doit s’en expliquer par écrit ou devant le Comité d’hygiène et sécurité et conditions de travail (CHSCT) compétent.
Voilà plusieurs années que SUD Éducation exige que tous les moyens soient mis en œuvre pour que la législation relative au travail s’applique dans l’Éducation nationale, et s'engage à défendre les droits du personnel en mettant tout en œuvre pour rattraper le retard dans l’application des lois (Code du Travail) et décrets, et ce notamment en raison de conséquences néfastes sur la santé (mal-être, dépressions, accidents, suicides).Pour Sud Éducation, l’organisation pathogène du travail est un fait incontestable. Les méthodes managériales qui se mettent en place ont été condamnées par la justice dans d’autres secteurs. Au passage notez, parmi de nombreuses causes pathogènes :
• l’accueil de stagiaires-enseignant-e-s sans formation,
• l’évaluation des personnels selon des critères plus que discutables,
• les salles de cours inadaptées,
• l’augmentation des effectifs sans prendre en compte les particularités d’élèves relevant d’enseignements adaptés ou « mal dans leur peau », etc.
SUD Éducation rappelle que le croisement et/ou la conjonction de ces multiples facteurs, peuvent avoir des conséquences dévastatrices, exige que toutes les situations « d’arrêts de travail » du fait ou en lien avec le travail, soient, selon la réglementation de la sécurité sociale, considérées en accident de travail ou de service et non en arrêt maladie ordinaire. SUD Éducation exige le respect de la loi et que les CHSCT soient consultés et informés sur toutes les mesures modifiant les conditions de travail.